Il est vrai qu'il y
a eu un grand engouement pour le dernier film de Xavier Dolan,
Mommy,
sorti en salle le 8 octobre 2014. On trouve de nombreux articles qui
portent ce film aux nues. Une fois de plus, son nouveau film fut
présenté au festival de Cannes 2014 et les médias ne cessent de
mettre en avant ce nouveau scénario. Est-ce vraiment vérifié ?
Diana ou « Die »
incarnée par la fabuleuse Anne Dorval est une veuve qui reprend la
garde de son fils Steve (Antoine-Olivier Pilon) suite à une
expulsion de son centre de rééducation en raison d'un incendie. Ce
dernier est atteint de troubles comportementaux (TDAH) et les
retrouvailles avec sa mère seront autant explosives qu'émouvantes.
Apparaît alors un troisième personnage, Kyla (Suzanne Clément), la
voisine d'en face, une enseignante dépressive en congé sabbatique
qui va devenir l'amie de Diana et le professeur de Steve. Ce trio
très fragile, à la limite du déséquilibre, nous emporte dans des
relations orageuses et passionnées.
Le format resserré
(1:1) choisi par Dolan permet de dresser le portrait des personnages
dans un esthétisme qui n'est pas dénué de sens. Nous sommes figés
face à cet isolement à la limite de l'étouffement qui nous dévoile
une quête d'espoir, une redoutable envie de nouveaux horizons et de
liberté merveilleusement représentés quand Steve écarte les bords
du cadre sur un air de « Wonderwall » d'Oasis.
Xavier Dolan sait
sublimer ses personnages, les mettre en avant dans toute leur
complexité. Il dévoile les failles, montre la tragédie sans pathos
et nous bouleverse par la grâce de ces instants de vie. Ce film
ressemble à des instantanés de gens écorchés, désœuvrés, qui
colmatent comme ils peuvent les blessures d'une vie pessimiste et
sombre. Suzanne Clément qui était magistrale dans
Laurence
Anyways (2012) apporte de la douceur au trio quant à
Antoine-Olivier Pilon... je n'ai pas beaucoup de mots pour décrire
sa jeunesse, sa rage, sa beauté mais il est définitivement magique.
Je me suis demandée
si j'irai voir le film au cinéma. Je suis le jeune réalisateur
depuis son long-métrage
J'ai tué ma mère (2009) qui m'avait
profondément marquée à l'époque. J'avais alors rencontré un
prodige du cinéma mais surtout, un artiste. J'avais aussi découvert
par la même occasion l'actrice Anne Dorval qui est sans doute
devenue une icône de la représentation maternelle.
Même en pantalon
moulant à sequins avec des talons compensés et des bijoux
fantaisies, Anne Dorval parvient à garder une élégance qui me
sidère.
Hésitante, je
l'étais. Je n'avais vu que ses deux premiers films au cinéma,
préférant voir les autres tranquillement chez moi pour exprimer mes
émotions sans honte. Finalement, je décidais de me rendre à un
cinéma d'art et d'essai en plein après-midi et de me laisser
emporter par
Mommy. Je suis restée scotchée à mon fauteuil.
Je ne suis pas une mère dépassée, ni une enseignante dépressive,
ni un gars qui se sens étriqué dans un monde qui ne le comprend pas
mais pourtant, je les comprend tous. Comment se fait-il qu'à chaque
fois que je visionne un de ses films, je reste silencieuse, comme
sonnée, choquée ?
Les scénarios de
Xavier Dolan, la puissance de ses personnages, l'univers musical (il
n'y a que lui qui puisse m’entraîner dans une musique de Céline
Dion!) me prennent aux tripes. Il n'est pas dans un genre codifié
mais nous montre avec une grande simplicité, des gens cabossés où
on se retrouve tous à un moment donné. J'aime particulièrement
observer ses personnages de dos. Leur démarche, leur nuque, tout est
sensuel, gracieux...
Ma gorge fut serrée
tout le long du film. Je ne voulais pas qu'on voit un visage ravagé
quand les lumières de la salle se rallumeraient. Je suis restée
muette, assise à fixer le générique de fin pendant que mon esprit
errait dans un brouillard sans fin. Il y aurait tant de choses à
raconter, à dire, à écrire sur ce film ou sur les autres mais je
pense en avoir assez dévoilé.
Xavier Dolan, on
déteste ou on adore. Pour ma part, je rêverai de rencontrer ce
jeune québécois pour parler écriture, scénario et tout le
reste... Peu de réalisateurs me touchent comme il le fait. Je me
pose juste une question : quand parleras-tu de la relation
père-fille ? Je suis plus qu'intriguée de la représentation
que tu peux en faire...
Ambre